Avec la crise, l’explosion des coûts, la précarité galopante et des subsides en initiatives qui ne sont pas indexés contrairement aux salaires, les services sociaux à Bruxelles sont au bord de l’implosion. Les employés du secteur social et de la santé seraient quant à eux sur le fil et peineraient à maintenir leurs missions d’utilité publique, sociale. C’est le cri d’alarme lancé par l’Interfédération ambulatoire (IFA) dans une lettre ouverte publiée en novembre dernier.
Par Emilie Pommereau, dans Alter Échos, mai 2023
Services de santé mentale, de médiation de dettes, d’aide aux toxicomanes, aux travailleurs du sexe, services d’hébergement, plannings familiaux, maisons médicales… Voilà tous les services sociaux essentiels mis en péril par des difficultés financières. Alain Willaert, coordinateur général du Conseil bruxellois de coordination sociopolitique (CBCS), qui abrite l’IFA (un groupe de travail regroupant des représentants de différentes fédérations social-santé actives en Région bruxelloise), souligne que si le secteur non marchand est depuis longtemps structurellement sous-financé, la crise du Covid-19 a aggravé les tensions entre les besoins de la population et l’offre de services. «Pendant les confinements successifs et les mesures sanitaires pour lutter contre la pandémie, tous les services publics étaient fermés. Parfois à la limite de la légalité et de la protection sanitaire, certains services associatifs sont restés ouverts tant bien que mal et ont essayé de rester présents face à l’accroissement dingue des demandes alors que les conditions étaient difficiles.»
Alain Willaert met le doigt sur le paradoxe actuel dans le social-santé : parallèlement à une saturation des services et à un essoufflement extrême des équipes, il n’y aurait jamais eu autant d’accord entre les visées politiques et les attentes de l’associatif. « La note de vision de l’IFA se retrouve quasiment intégralement dans le Plan social santé intégré promulgué par le gouvernement. La politique actuelle est donc en théorie en adéquation avec le secteur du social et de la santé. Le souci reste toujours le même: l’argent. Il manque du pognon pour mettre en œuvre ce PSSI de la meilleure manière qu’il soit. »
A titre d’exemple, Alain Willaert cite une mesure qui, d’après lui, aiderait vraiment les services sociaux : la reconnaissance et le financement, dans chaque service agréé dans le cadre du décret ambulatoire, d’une coordination générale. Un travail de gestion administrative et financière essentiel pour faire tourner un service qui n’est pas prévu dans le cadre subventionné et qui est pour l’instant pris sur le temps de travail d’un assistant social ou d’un psychologue, c’est-à-dire sur la mission même du service. «L’IFA a estimé que cette mesure coûterait 7 millions d’euros. Soit la somme que la Cocof a mise sur la table pour mettre en branle tout le PSSI. Cela illustre le fossé entre ce qui devrait être fait et les possibilités. Les ministres en charge du social et de la santé font ce qu’ils peuvent dans leur carcan budgétaire. Ce qu’il faudrait, c’est que nos revendications percolent à d’autres niveaux de pouvoir», conclut Alain Willaert.