ACS : ne jetez pas l’enfant avec la 6ème réforme de l’Etat !

Conclusion politique de la Plateforme ACS dont fait partie le CBCS, 25 mars 2016.


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La plate-forme tient à remercier vivement tou(te)s celles et ceux qui ont manifesté leur intérêt pour notre initiative, ont répondu à l’enquête et ont participé au Forum de ce vendredi 25 mars à l’HELB.
Vous trouverez ci-dessous notre analyse politique telle qu’elle a été présentée à l’issue de cette rencontre.

Nous préparons également un compte-rendu de la journée. Vous le retrouverez sur ce site lorsqu’il sera prêt.

Si votre association souhaite intégrer la plate-forme, merci de nous contacter à info@plateformes.be

ACS : ne jetez pas l’enfant avec la VIe réforme de l’Etat !

Suite à la VIe réforme de l’État, d’importantes compétences en matière de politique de l’emploi ont été transférées aux Régions. Dans ce contexte, le gouvernement bruxellois issu des élections de mai
2014 a annoncé son intention de mettre en œuvre une réforme du programme ACS. Ce programme finance quelque 7.000 emplois dans le secteur non-marchand bruxellois et près de 3 300 dans le secteur public.

Avant d’appréhender ce projet de réforme, il nous paraît important de souligner quelques éléments de contexte.

La région bruxelloise a des caractéristiques sociologiques spécifiques. Tout en étant une capitale nationale et internationale, siège d’institutions connues à travers le monde, elle comporte une population qui connaît une pauvreté et une polarisation de la répartition des revenus particulièrement importante. Un bruxellois sur trois est sous le seuil de risque de pauvreté. Ce qui est deux fois plus qu’en région wallonne et trois fois plus qu’en région flamande.

Les premiers programmes de résorption du chômage (PRC) datent de la fin des années 1970’.
L’idée : maintenir le pouvoir d’achat de la population par la création d’emplois subventionnés. Ce sont les Cadres Spéciaux Temporaires, et plus tard, les Troisième Circuit de Travail (TCT).

À Bruxelles, la dernière grande réforme des Programmes de Résorption du Chômage date de 1996, année durant laquelle le Gouvernement de Charles Picqué transforme la quasi-totalité des TCT en Agent contractuel subventionné (ACS). Au contraire des TCT, les ACS ne sont plus considérés comme demandeurs d’emploi et leur patron est l’association qui les engage (Pour mémoire, les TCT étaient directement payés par l’Office régional de l’emploi – aujourd’hui Actiris).

Cette transformation a permis la création nette d’emploi, en effet, la réduction d’ONSS plus importante pour un ACS que pour un TCT a permis des économies budgétaires qui ont été réinvesties, pour une bonne partie, dans la création de plus de 500 nouveaux postes ACS.

Ce dispositif ACS était tant considéré comme une mesure de remise au travail que comme une aide structurelle au secteur non marchand, lui permettant de bénéficier d’un apport en personnel (nettement) moins précaire et pouvant répondre à ses besoins.


Aujourd’hui, le coût budgétaire du dispositif ACS pour la Région bruxelloise est important : environ 190 millions d’euros. Il convient toutefois de mettre ceci en regard avec les autres grands programmes d’aide à l’emploi. Plus de 210 millions d’euros sont affectés aux réductions de cotisations sociales et aux groupes cibles (sans aucun effet avéré sur le volume global de l’emploi). Plus de 200 millions d’euros sont également consacrés au financement des titres services, qui bénéficient essentiellement aux ménages les plus aisés.

Le secteur associatif est frappé de plein fouet par les mesures d’austérité budgétaire adoptées aux divers niveaux de pouvoirs. Le Non Marchand, particulièrement les secteurs du socioculturel, de l’aide et du soin, est aujourd’hui déjà structurellement sous-financé. Les moyens ne sont plus à la hauteur des besoins de la population en général et des demandes adressées aux services de première ligne en particulier.
Parallèlement, les modalités d’octroi, de plus en plus fondés sur des appels à projets de courte durée, précarisent les conditions de travail, mettent en péril l’accumulation de compétences internes, augmentent les contraintes administratives et complexifient à outrance la gestion des associations.

Le dispositif ACS actuel permet au secteur non marchand de bénéficier d’emplois qualifiés à durée indéterminée. Toute précarisation de ce dispositif sans contrepartie au moins équivalente aurait au moins trois impacts :


  1. Elle remettrait en cause des emplois de qualité dans le secteur non marchand (CDI, égalité de barème…),
  2. Elle fragiliserait l’action du secteur associatif et non-marchand bruxellois,
  3. Elle handicaperait l’accomplissement des missions d’utilité publique assurées par les associations et, au sens large, la cohésion sociale régionale.

De nombreuses associations ne sont pas en mesure de faire face à l’abrogation du financement à 100 % de leurs postes ACS. Elles ne disposent pas de marges financières permettant de prendre le relais. Ce financement doit dans ces conditions être pérennisé. Nous avons constaté que les inspections financières menées par Actiris ne tenaient pas compte des réalités sectorielles et ne pouvaient rendre compte de la capacité réelle des associations à prendre en charge 5% du salaire des postes ACS.

Par ailleurs, le Gouvernement bruxellois a plusieurs fois évoqué son intention de privilégier les contrats à durée déterminée pour les emplois subsidiés. L’enquête que nous avons menée a souligné les conséquences extrêmement graves pour les associations, leur personnel, leurs missions, leurs usagers, de toute transformation de postes ACS CDI en postes ACS à durée déterminée.

En effet, pour notre personnel, il s’ensuivrait une précarité, une diminution de la motivation, des inégalités entre les membres du personnel stables et temporaires, une perte de compétences et d’expérience, une surcharge de travail administratif à cause du turn-over. Cette énumération n’est pas exhaustive.
Quant aux usagers des secteurs de l’aide et du soin, ils seraient face à une diminution voire une rupture du suivi au niveau de la prise en charge, de l’aide, du soutien ou de l’accompagnement. Alors qu’ils ont pourtant besoin de repères et de sécurité …
Enfin, pour nos projets et la manière de pouvoir remplir nos missions, précariser nos emplois, c’est aussi ancrer nos projets dans une perte de cohérence et de continuité, risquer des diminutions des activités proposées et nous confronter à une difficulté à envisager des projets sur le long terme, pourtant si important dans la poursuite d’objectifs cohérents.

Ajouter une telle mesure, ou la remise en cause de l’attribution des postes ACS eux-mêmes, à la précarité du soutien que connaissent déjà les associations pourrait non seulement remettre en cause la qualité de leur travail, mais également la possibilité de le poursuivre.

Notre plate-forme n’est pas par principe opposée à toute réforme du programme ACS.
Nous estimons toutefois que celle-ci ne pourrait être mise en œuvre sans nuire gravement aux travailleurs et travailleuses, aux associations et à leurs missions que si elle respecte un certain nombre de principes :


  1. Pas de remise en cause des conventions passées avec ACTIRIS et les associations ni de leur caractère indéterminé,
  2. Pas de remise en cause du caractère indéterminé des contrats de travail offerts aux travailleurs et pas de remplacement de postes CDI par des postes CDD,
  3. Pas de diminution du financement public des emplois.

En outre, nous demandons que toute réforme éventuelle fasse l’objet de la part des autorités publiques d’une consultation préalable de l’ensemble des acteurs concernés. Vu la diversité des situations, l’avis de chacun devrait pouvoir être exprimé et pris en compte.

Si les pouvoirs publics bruxellois souhaitent modifier la forme du soutien à l’emploi associatif, tout en maintenant celui-ci au même niveau quantitatif et qualitatif, nous leur demandons de formuler publiquement des propositions détaillées et de les soumettre à une consultation largement ouverte, qui permette, le cas échéant, le rejet des propositions formulées et la pleine prise en compte des préoccupations des acteurs concernés.

Concernant la création d’emplois « ACS jeunes » supplémentaires pour une durée déterminée lui ouvrant l’accès aux allocations de chômage, décidée par le gouvernement, nous estimons qu’une association ne peut accueillir un jeune dans une logique d’activation, lui donner une expérience professionnelle et lui permettre de mettre le pied à l’étrier, qu’à partir du moment où cette association a le personnel structurel suffisant et suffisamment qualifié que pour assurer ses missions de base. En outre, ceci ne pourra se faire seulement si l’encadrement de ce jeune activé puisse se réaliser dans de bonnes conditions humaines et techniques, pour lui et pour l’ensemble du personnel. Il est impensable que ce type d’emploi se substitue à un autre déjà existant.

De plus, nous ne pourrons accepter que des financements affectés initialement au Non Marchand, ne glissent dans l’escarcelle du secteur marchand. Cet avis est partagé par le Conseil économique et social. Si le Gouvernement décidait, comme ça a été évoqué, d’élargir le dispositif « contrat d’insertion » au secteur marchand dans deux ans, les sociétés commerciales considéreront cela comme un effet d’aubaine, substituant un poste de travail peu qualifié mais « en dur » par un poste subventionné.

Le dispositif ACS joue un rôle essentiel en matière d’emploi, de soutien aux secteurs non-marchand et de cohésion sociale au sens large. Il peut être amélioré mais il ne doit pas être abîmé.

La Plateforme ACS
http://www.plateformes.be/ACS/

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