Opinion publiée sur le site du VIF le 21/11/18
Il faut de toute urgence radicaliser le combat pour le climat. À partir d’un réchauffement de 2°C, la Terre pourrait basculer dans un régime de ” planète étuve “. Un cataclysme inimaginable, avec une hausse des océans de 12 mètres au moins et une biodiversité effondrée. Si l’humanité survivait ce serait au prix de l’élimination des plus pauvres dans les pays pauvres, qui sont les moins responsables du changement climatique !
Le réchauffement est beaucoup plus menaçant et rapide qu’on ne le pensait. La température a augmenté de 1.1°C par rapport au 18e siècle et les conséquences sont là : sécheresses, cyclones ultra-violents, inondations, fonte des glaces… Aucun doute n’est permis : la catastrophe est en marche. Il faut tout mettre en oeuvre pour maintenir le réchauffement au-dessous de 1,5°C, comme décidé à la COP21.
Ce n’est pas ce qui est en train de se passer, loin de là. Les multinationales, la finance et les gouvernements à leur service ne l’entendent pas de cette oreille : “Tout mettre en oeuvre” mettrait en danger la croissance et les profits. Pour le moment, aucun des pays européen n’a même respecté ses engagements de la COP21.
Deux camps politiques se dessinent.
Le premier camp est celui de Trump et Bolsonaro qui jettent l’accord de Paris à la poubelle. Leur calcul est monstrueux : peu importe la catastrophe, les pauvres crèveront, les riches s’en sortiront toujours. Ce sont les chevaliers de l’Apocalypse climato-fasciste !
Le deuxième camp est celui des apprentis-sorciers. Macron, Merkel, Xi Jinping et Cie veulent “dépasser temporairement” les 1,5°C et refroidir le globe ensuite grâce aux “technologies à émissions négatives”. Ce serait risible si la situation n’était pas si grave : 1°) personne ne sait si ce refroidissement est possible ; 2°) cette idée encourage les “mauvais élèves” (comme la Belgique) à ne même pas respecter leurs engagements insuffisants ; 3°) pendant le “dépassement temporaire”, des rétroactions irréversibles peuvent déboucher sur la “planète étuve”.
Le mouvement climatique, et notamment les grandes ONG et les directions syndicales, ont tenté de convaincre les dirigeants de l’intérêt d’une “transition juste” et d’une “croissance verte” basée sur les renouvelables et l’efficience énergétique. L’échec de cette politique est malheureusement patent : la menace climatique augmente, les inégalités sociales explosent. Va-t-on continuer dans cette voie ?
Notre réponse est “Non”. Cessons de tourner autour du pot : la croissance, la compétitivité et le marché sont le problème, pas la solution. Il faut sortir du cadre capitaliste. Nous plaidons pour unir les causes de la justice sociale et de la justice climatique. Car nous sommes sur le même océan, mais pas dans le même bateau. Certain.e.s naviguent en barquette, d’autres en yacht.
Nous plaidons pour rassembler toutes les formes de résistance – éducation permanente, contestation culturelle, grèves, désobéissance civile, blocage des investissements fossiles, alternatives locales, etc. – dans une insurrection citoyenne démocratique, pacifique et déterminée. Rendons impossible le fonctionnement normal de ce système climaticide et criminel. C’est notre existence et celle de nos enfants qui sont en jeu.
Il n’est pas trop tard. Hors des dogmes du marché, tout devient possible : supprimer les productions inutiles et nuisibles ; interdire les transports ayant pour seul but les profits des multinationales ; bannir les productions à obsolescence programmée ; créer un organisme public pour isoler toutes les maisons ; généraliser des transports en commun gratuits et de qualité ; socialiser les secteurs de l’énergie et du crédit, qui bloquent la transition ; généraliser la souveraineté alimentaire par une agroécologie paysanne locale qui fixe le carbone dans les sols ; créer des millions d’emplois dans la restauration et le soin aux écosystèmes ; réduire radicalement le temps de travail, sans perte de salaire, avec embauche proportionnelle…
À tous les niveaux, sur tous les terrains, prenons les choses en mains, collectivement et démocratiquement. Il n’y a ni modèle clé sur porte ni sauveur suprême. Seulement quelques principes : la planète et nos vies valent plus que le profit ; les fossiles restent sous terre ; moins de marché, plus de public ; produire moins, partager plus ; répartir les richesses et le travail nécessaire. C’est de la convergence de nos mobilisations qu’émergera une alternative de société digne de ce nom.
Nous invitons toutes celles et ceux qui se reconnaissent dans cette voie à :
•Signer ce texte via le site http://urgence-climatique-et-sociale.be.
•Se rassembler dans la manifestation du 2 décembre pour le climat (Bruxelles, Gare du Nord à 12H) à côté de la gare derrière la banderole “Stop Climate Criminals”
•Concevoir avec nous la suite de ce combat et construire ensemble cette convergence nécessaire.
Pour tout contact: Stop.tourner.autour.du.pot.climat@gmail.com.
Premiers signataires :
Yaël André (Cinéaste)
Antoinette Brouyaux (Activiste climatique)
Jean Cornil (Essayiste)
Chloé Deligne (Historienne, ULB)
Thibaut Demeulemeester (Gauche anticapitaliste)
Brigitte Gloire (Activiste climatique)
Stéphanie Grisard (Initiative “grève pour le climat”)
Paul Hermant (Actrices et Acteurs des Temps présents/Bruxelles)
Sébastien Kennes (Rencontre des Continents)
Elisabeth Lagasse (Chercheuse en sociologie à l’UCL)
Christine Mahy (Secrétaire générale du Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté)
Pierre Ozer (Chercheur ULiège)
Jacinthe Mazzocchetti (Professeure UCL)
Céline Nieuwenhuys (Secrétaire générale Fédération des Services Sociaux)
Isabelle Stengers (Professeure ULB)
Jean-François Tamellini (Secrétaire fédéral FGTB)
Daniel Tanuro (Climat et Justice Sociale)
Bruno Tondeur (Réalisateur)
Anaïs Trigalet (écologiste)
Felipe Van Keirsbilsck (Secrétaire général CNE)
Mathieu Verhaegen (Président de la CGSP-ALR-BRU)
Johan Verhoeven (Activiste, membre d’ADES)
Pascale Vielle (Professeure UCL)
Grégoire Wallenborn (Professeur ULB)