Prostitution décriminalisée : mobilisation communautaire & recul du stigmate !

« Comment pouvons-nous vous aider ? », interroge le GEES – groupe de travail chargé de conseiller le gouvernement en pleine pandémie – à l’adresse d’Utsopi, l’Union des Travailleu(r)ses du Sexe qui regroupe des bénévoles et des associations. Le collectif a pris la balle au bond. « La crise Covid a clairement permis d’accéler les choses », résume Daan Bauwens d’Utsopi. Suite à un travail de lobbying réalisé par et avec la parole des premiers concernés, le résultat est là : la décriminalisation du travail du sexe en Belgique a été approuvée par le Parlement fédéral le 18 mars 2022 !

Par Stéphanie Devlésaver, CBCS asbl, avec https://utsopi.be/ – mai 2022

« C’est une avancée énorme pour les droits des travailleu(r)ses du sexe et l’aboutissement de 30 ans de lutte en Belgique », souligne l’association Utsopi, qui milite depuis 2015 pour leurs droits.

Qu’est-ce qui change réellement ? 

Ces dispositions, voulues par le ministre fédéral de la justice, Vincent Van Quickenborne (Open VLD), font de la Belgique le premier Etat européen à adopter de telles mesures, et le deuxième au monde après la Nouvelle-Zélande. A l’avenir, les prostitués – des femmes, dans une proportion de 95 % – auront les mêmes droits que les autres travailleurs indépendants, dont celui de bénéficier de la sécurité sociale, du chômage, de l’accès aux soins, d’un congé maternité, etc. Et par ailleurs, « tous les tiers qui soutiennent leur activité ne peuvent plus être poursuivis, sauf en cas de profit anormal », précise Utsopi.

« C’est la fin de la loi de la jungle » !

Daan Bauwens, Utsopi

Auparavant, la loi belge visait à rendre la pratique du travail du sexe aussi difficile que possible et donc à décourager le travail du sexe ou à le faire disparaître. Toute forme de gestion était criminalisée et qualifiée de proxénétisme. Pendant ce temps, le secteur de la gestion était toléré dans le cadre de la politique de tolérance belge. Cela a conduit à une situation où aucune différence n’a été faite entre la gestion et l’exploitation, car il est impossible d’imposer des règles à un secteur qui a été criminalisé dans son intégralité. Entre-temps, les villes et communes ont élaboré leurs propres réglementations, ce qui a entraîné un manque de clarté, le chaos et la fragmentation du secteur.

Enfin, la criminalisation de toute forme de gestion a rendu très difficile, des fois impossible, l’obtention d’une protection sociale pour les travailleu(r)ses du sexe qui travaillaient en tant que salariés et, souvent, n’était guère constitués de droits sociaux comme les autres travailleurs (congé annuel, assurance maladie, congé de maternité, droit à un revenu de remplacement, allocations de chômage, pension, etc.).

La nouvelle loi, résume Alias, autre association bruxelloise qui accompagne les personnes concernées par la prostitution, « réduit les risques pénaux liés à la pratique du travail du sexe et ouvre un meilleur accès aux droits sociaux, à la protection, aux soins de santé, au logement et à toutes les institutions ».

« Mais la lutte n’est pas finie« , rappelle Daan Bauwens, « actuellement, nous sommes dans une situation de décrimininalisation – reconnaissance de l’existence du secteur – mais pas dans une situation de réglementation de l’activité« . C’est la seconde étape : mettre en conformité le travail du sexe avec le droit au travail. « Nous sommes le deuxième pays d’Europe, après la Nouvelle Zélande, à ouvrir cette négociation politique sur les questions du droit au travail des travailleurs du sexe. Nous nous basons d’ailleurs sur leurs travaux pour formuler une proposition de loi !« .

Pour en savoir plus :

– Rubrique Décriminalisation, sur le site d’Utsopi

– Lire l’interview d’Utsopi parue dans ELLE Belgique : « La Belgique devient le deuxième pays du monde à décriminaliser le travail du sexe », par Camille Vernin, 24/03/2022

Extrait choisi :

« Le cabinet du ministre a choisi d’écouter les personnes concernées, c’était une première. Utsopi a collaboré étroitement avec le ministre et son cabinet. Quand tu parles avec les personnes concernées (associations, centres psycho-médicaux, polices…), que tu laisses tomber tes clichés et tes stéréotypes, alors tu peux arriver à quelque chose de bien, qui va fonctionner. C’est quelque chose qu’il faudrait faire dans beaucoup d’autres domaines… »

Daan Bauwens, Utsopi

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