Mémorandum 2019 du CBCS

Pour son mémorandum à l’occasion des élections régionales 2019, le CBCS met l’accent sur la nécessaire collaboration trans-communautaire.


Depuis 2014, le CBCS a été l’un des interlocuteurs privilégiés de l’associatif en social-santé pour les questions de clarification concernant l’implémentation de la VIe Réforme de l’État. Nous pouvons aujourd’hui témoigner de l’approfondissement du fait régional, d’une prise de conscience de Bruxelles en tant que Région.

Mais l’effet ressenti de cette VIème Réforme qui a vu de nouvelles compétences attribuées majoritairement à la Commission communautaire commune, est celui d’une plus grande incohérence du paysage institutionnel de la Région.
Quatre entités fédérées se partagent les compétences qui concernent directement les Bruxellois et cohabitent avec un État fédéral dont les choix politiques impactent souvent négativement la vie quotidienne de nos publics.

Les compétences social/santé, ou en lien direct avec celles-ci, sont émiettées – sans grande logique, vu du terrain – entre une série de responsables politiques.
Les découpages institutionnels et communautaires complexifient l’intervention des opérateurs de terrain et compliquent considérablement la vie des citoyens, hypothéquant même parfois l’accès à certains droits.

Un bel exemple est celui de l’assurance autonomie : elle existe en Flandre, est obligatoire et intégrée à la sécurité sociale flamande. La cotisation donne droit à une intervention financière de 130 euros/mois. L’adhésion à l’assurance autonomie flamande est facultative à Bruxelles : les Bruxellois qui le souhaitent peuvent y souscrire et en bénéficier s’ils répondent aux conditions (celles-ci sont néanmoins plus sévères qu’en Flandre, notamment au niveau de la période de stage). On parle aussi d’assurance autonomie en Wallonie et à Bruxelles, mais rien encore n’est abouti ni sur le mode de financement ni sur le type d’intervention.

On pourrait aussi citer l’influence des réformes de la psychiatrie adulte et infanto-juvénile ou de la psychothérapie sur l’activité des services de santé mentale, la dissonance entre les politiques drogue menées par le fédéral et celles préconisées au niveau régional, la politique d’aide aux personnes sans-abri ou encore l’influence du plan e-santé sur les pratiques de terrain.

Ces découpages consécutifs au morcellement des compétences se doublent d’une méconnaissance grandissante par les acteurs de terrain des dispositifs existants dans les autres régions. Par exemple, les travailleurs sociaux bruxellois francophones sont souvent mal informés des dispositifs existants aussi bien en Flandre qu’en Wallonie. Or, la vie des citoyens ne s’arrête pas à la frontière des Régions ! Les gens bougent, déménagent, travaillent dans une région et habitent dans une autre… À Bruxelles, les dispositifs CoCoF, CoCoM et VG se côtoient. Certains peuvent se cumuler, d’autres pas, certains sont plus avantageux. Par exemple, pour certaines aides aux personnes handicapées, une reconnaissance VAPH (VG) sera plus avantageuse qu’une reconnaissance Phare (CoCoF), mais dans une autre situation, ce sera le contraire. Dès lors, dans un tel contexte de morcellement, pour arriver à défendre et à faire valoir les droits sociaux de tout un chacun, il est essentiel de mieux connaître les dispositifs des différentes régions, mais surtout d’avoir les bons relais auprès des différentes instances à partir desquelles il est possible d’activer ces droits.

Si les professionnels du terrain éprouvent des difficultés avec les dispositifs mis en place par les pouvoirs, pour les usagers, c’est pire. À titre d’exemple, l’usager bruxellois qui fait appel à un service d’aide à domicile devrait effectuer une étude de marché, car suivant son revenu, le coût de l’aide à l’heure va lui réserver bien des surprises ! En effet, les entités subsidiantes n’ont jamais harmonisé les tarifs et, suivant les revenus de l’usager, le coût de l’aide à l’heure varie de 0,50€ (faible revenu, CoCoM) à 14,14€ (revenus plus élevés, VG).

Nous constatons que tant les pouvoirs publics que les cadres associatifs planchent aujourd’hui sur de nouveaux modèles d’organisation de la première ligne d’aide et de soins. Si les seconds imaginent des modèles qui font fi des barrières institutionnelles et recommandent la porosité des sources de financement, les premiers ne peuvent ou ne veulent agir qu’à partir de la fragmentation institutionnelle des allocations budgétaires trop cloisonnées et des champs de compétences de chaque ministère.

Nous devons ainsi composer avec un Plan Santé CoCoM et un Plan Promotion de la santé CoCof, des travaux de réorganisation de la première ligne d’aide et de soins sont actuellement entrepris tant en CoCof qu’en CoCoM, mais on peine à percevoir une stratégie concertée … Chaque commission communautaire commande et utilise ses propres études, ses propres données, élabore ses propres outils, et peine à les partager, à les confronter, à en imaginer l’interpolation.

Nous pensons qu’il n’est plus possible que les différents niveaux de pouvoirs développent leurs dispositifs d’aide et de soins de manière isolée et imperméable. Ces institutions ne sont pas des îles et elles ont besoin les unes des autres pour pouvoir penser une Région bruxelloise à part entière de manière globale, pour le bien-être de tous les habitants.

Des exemples positifs peuvent renforcer notre propos. L’élaboration d’un logiciel de recueil de données commun aux Centres d’action sociale globale (CoCoF) et aux Centres d’aide aux Personnes (CoCoM) a été facilitée par le traitement du dossier au sein d’un même cabinet ministériel compétent pour les affaires sociales en CoCoF et en CoCoM. Les ASBL Infor-Home (subventionnés par la CoCoF) et Home-Info (subventionné par la VG) travaillent ensemble quotidiennement grâce à la mise en place d’une coupole subventionnée par la CoCoM.

L’approfondissement de la collaboration trans-communautaire que nous appelons de nos vœux doit s’appréhender dans le respect et la reconnaissance réciproques des savoir-être, savoir-faire et méthodes d’intervention de l’autre communauté. Il ne s’agit pas de remplacer un modèle par un autre, mais de tenir compte des plus-values et de la complémentarité de chaque modèle. Nous postulons que le métissage des cultures et des pratiques sur le territoire bruxellois est une force plutôt qu’un frein à l’émergence d’un dispositif régional qui permette l’organisation efficiente et harmonieuse de l’aide et du soin sur l’ensemble du territoire et de ses habitants.

Voilà pourquoi le CBCS se réunit avec l’Observatoire du social et de la santé, le Centre de documentation et de coordination sociales,le Kenniscentrum Welzijn Wonen Zorg, Huis voor Gezondheid et le Brussels Overleg Thuiszorg. Le point commun de nos 6 organismes (1 CoCoF, 2 CoCoM et 3 VG) est d’être des structures de soutien à la 1re ligne d’aide et de soin sur le territoire bruxellois. Certaines de nos missions se recoupent, d’autres sont spécifiques à chacun, et les activités et méthodologies d’intervention varient grandement. Nous ne considérons néanmoins pas qu’il s’agit de barrières infranchissables pour agir de manière concertée.

Voilà pourquoi également le CBCS collabore depuis le mois de mai 2017 avec Perspective.Brussels, cette nouvelle administration régionale qui regroupe les compétences en matière d’aménagement du territoire. Des urbanistes, des statisticiens, des sociologues, des documentalistes et des travailleurs sociaux des niveaux régionaux et communautaires au service de la ville de demain.

Mais cela ne suffit pas. Le CBCS demande dès lors aux différents gouvernements de la région bruxelloise de soutenir la mise en œuvre d’une politique trans-communautaire et de penser un outil de gouvernance pertinent pour le déploiement d’une 1re ligne d’aide et de soins organisée par les Communautés, mais pensée sur une base régionale.

Le Conseil d’administration du CBCS

, janvier 2019

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