La culture, pansement de l’âme

La rencontre entre art et soin est aujourd’hui reconnue et a pris des formes variées, que ce soit via l’art-thérapie ou via des ateliers culturels en milieu hospitalier. L’article « L’art de soigner » s’intéresse aux vertus de l’art sur la santé des patients. Il fait partie du dossier spécial du dernier Santé Conjuguée, consacré aux liens entre culture et soins.

« L »art de soigner », par Marinette Mormont, dans Santé Conjuguée n°99/Juin 2022

Laurent Bouchain, licencié en arts du spectacle, a proposé durant huit ans, des ateliers de théâtre à l’Hôpital psychiatrique Saint-Jean-de-Dieu, à Leuze-en-Hainaut. Cette collaboration a, par la suite, débouché sur la création d’un service de médiation culturelle au sein de l’hôpital. Aujourd’hui, les six artistes et l’animatrice qui composent ce service sont les salariés d’une équipe reconnue au même titre que les autres. L’hôpital a également aménagé des espaces spécifiques pour que les patients puissent se « déconnecter du traumatique ». « On a très vite eu l’impression que les personnes arrivant du milieu de soin à l’atelier théâtre se débarrassaient de leurs problèmes. Elles venaient pour être à nouveau présentes en tant que personnes, hors des raisons pour lesquelles elles avaient été hospitalisées », confie Laurent Bouchain. Les personnes savent que ce qui est fait en atelier est un travail artistique, qui n’est pas encadré par des thérapeutes, ce qui laisse plus de liberté à l’expression.

Hors des murs de l’hôpital

Diffusion d’œuvres artistiques au sein de l’hôpital ou d’œuvres nées dans l’hôpital auprès d’opérateurs culturels, création d’ateliers avec des publics mixtes, l’expérience permet aussi de faire sortir les patients et leur art à l’extérieur des murs. Bruno Hesbois, de la Compagnie Buissonnière (Centre de Théâtre-Action), élabore des projets de création théâtrale avec des publics fragilisés. Grâce aux processus créatifs au cœur de ses ateliers, les participants prennent de la distance avec leur histoire – avec ces moments où ils ont ressenti le mépris ou la condescendance, ces sentiments de colère, aussi – pour aboutir à un récit au sein duquel alternent émotions et légèreté. C’est aussi une manière de lutter contre les stigmates, encore très présents et de casser les fausses perceptions du public sur les maladies mentales ou le handicap.

« La culture et l’art, en renforçant la cohésion sociale, le sentiment d’appartenance et de partage, favorisent aussi une meilleure prévention et la promotion de la santé »

Marinette Mormont, L’art de soigner, Juin 2022

Dans le cadre des contextes traumatiques, la culture « fait du bien à l’âme ». Mélissa Généreux, directrice en santé publique pour la région de l’Estrie (Québec) cite notamment le travail du Théâtre des petites lanternes avec des femmes ayant subi des violences sexuelles en République démocratique du Congo ou encore après un tremblement de terre en Haïti qui, avec sa « grande cueillette des mots », collecte des pages entières de partages d’un vécu commun ensuite transformées en une œuvre théâtrale qui sera présentée à la population locale puis à d’autres groupes en vue de les sensibiliser. Au Québec, un comité Art et Santé, composé d’experts des milieux de la santé, de l’art- thérapie, de la recherche et des arts promeut depuis cinq ans la recherche sur l’art et la santé. L’objectif à terme : que ces projets soient valorisés – y compris financièrement – et systématisés.

En Belgique, il n’y a pas de reconnaissance structurelle des liens entre art et soins. Les processus de création de ces espaces sont temporaires et bénéficient de subventions ponctuelles. Nouveauté cependant : en septembre 2021 ont été lancées les « prescriptions muséales » à l’initiative de la Ville de Bruxelles et du CHU Brugmann. Laurent Bouchain explique, qu’au même titre que l’on prescrit des médicaments ou des séances de sport, les médecins peuvent désormais prescrire une visite dans l’un des musées de la Ville. Une manière de recréer du lien social et de lutter contre la stigmatisation, la manière dont les patients sont perçus ou se perçoivent eux-mêmes. « En les faisant accéder à des musées, ils retrouvent une place de citoyen. Peu importe leur pathologie de départ, ce qui compte, c’est l’accès aux représentations artistiques qui sont perçues de manière différente pour chacun d’entre nous », se réjouit Charles Kornreich, chef du service psychiatrie de l’hôpital.

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