La mise en place du projet « Housing First » dans plusieurs pays tels que la France et le Canada, a mis en évidence que permettre aux personnes sans-abri d’obtenir un logement afin de les réinsérer dans la société pouvait parfois avoir un coût moindre pour l’État que le coût de les laisser dans la rue. Malgré une volonté politique belge et européenne de prévenir et de mettre fin au sans-abrisme, aucune étude n’a été réalisée sur son coût social en Belgique francophone, ne permettant donc pas d’évaluer les politiques mises en place et les changements éventuellement nécessaires. L’objectif de l’étude synthétisée ici est d’évaluer le coût social du sans-abrisme en Région de Bruxelles-Capitale, en tenant compte à la fois des coûts directs, mais aussi des coûts indirects, et de les comparer ensuite aux coûts associés à la sortie du sans-abrisme.
Un article de Justine Carlier et Magali Verdonck, publié dans Brussels Studies, Février 2024
La nuit du 8 au 9 novembre 2022, Bruss’help a réalisé un dénombrement des personnes en situation d’exclusion liée au logement en Région de Bruxelles-Capitale : 7 134 personnes ont été recensées, soit une augmentation de 18,9 % depuis le précédent dénombrement en 2020. Cette augmentation a, une nouvelle fois, soulevé de nombreuses questions quant à l’efficacité des politiques publiques mises en place pour prévenir le sans-chez-soirisme.
En matière de coût lié au sans-chez-soirisme, il est assez immédiat de penser aux coûts liés aux dispositifs tels que les maisons d’accueil, les centres d’hébergement d’urgence, le travail de rue, etc. Ces dispositifs représentent un coût de plus de 65 millions d’euros en 2021 pour la COCOM, la COCOF, et l’État fédéral. Ce chiffre ne tient pas compte des financements supplémentaires de la VGC, de la VG, de la RBC ni des dons privés, dont les données n’étaient pas disponibles. En divisant ce montant par le nombre de personnes dénombrées en 2020 (dernier chiffre disponible au moment de réaliser la recherche, soit 5 313), on obtient un montant moyen de 12 265,58 euros dépensé annuellement par personne sans-abri en 2021 (hors budget spécifique COVID).
Ce montant peut déjà paraître important. Il ne tient cependant pas compte d’une série d’autres dépenses effectuées indirectement pour les personnes sans-abri. Les coûts totaux liés au sans-chez-soirisme peuvent en effet être classés en 4 catégories : les coûts directs (liés aux services spécifiquement dédiés aux personnes sans-abri), les coûts indirects (services qui ne sont pas spécifiquement dédiés aux personnes sans-abri), les pertes de recettes fiscales (liées au fait qu’une personne ne paie pas d’impôts ou de cotisations) et enfin le coût des années de vie perdues.