Un collectif de signataires signe une carte blanche sur l’explosion des violences dans le quartier Nord à Bruxelles. Face à cette recrudescence rendant la vie infernale aux habitants, aux travailleuses du sexe et aux travailleurs sociaux, quelles solutions mettre en place ?
A l’initiative d’Espace P et d’Utsopi, 14/09/2022
Depuis plusieurs années les travailleuses du sexe (TDS), les habitant·e·s, les commerçant·e·s, les travailleur·euse·s sociaux de terrain subissent le déclin du quartier Nord à Bruxelles. L’espace public est envahi par des immondices qui, de jour comme de nuit, jonchent les trottoirs. Les rues sont infectées de mictions sauvages où l’odeur d’urine et de défécation humaine sont le lot journalier pour les gens du quartier. Les violences verbales et physiques sont, quant à elles, omniprésentes.
La peur au ventre
Concrètement, des heurts violents se déroulent toutes les nuits sous les fenêtres des habitant·e·s (coup de couteau, passage à tabac…), les clients des TDS ou les badauds sont détroussés. Des personnes forcent les portes d’immeubles pour y dormir ou faire leurs besoins, les insultes et les intimidations sont monnaie courante. En découle un quartier déserté de présence humaine de passage, sans plus de vie sociale, qui serait susceptible d’enrayer les incivilités, les violences et les délits.
Les TDS sont nombreuses à vouloir quitter le quartier, travaillant la peur au ventre. Chaque semaine une fille se fait agresser, les bons clients fuient le quartier quand des pseudo-clients rackettent et récupèrent l’argent de la prestation sous peine de tabasser la fille.
Nos travailleur·euse·s sociaux·ales sont aussi mis·es en danger lorsqu’ils et elles vont en rue. Nous n’échappons pas à la menace des groupes de dealers, à l’agressivité de certaines personnes mal intentionnées voire à des tentatives de vols. Nous craignons de devenir des victimes collatérales d’un règlement de compte. Les associations n’ont d’autre choix que de s’accommoder de la présence de consommateurs qui trouvent refuge sur les pas de porte des asbl, au risque d’effrayer leur public.
Force est de constater que la dégradation du quartier existe depuis plusieurs années. Mais suite à la crise sanitaire, qui a engendré une diminution du contrôle social par le télétravail, par l’arrêt des métiers du sexe dans le quartier, des bandes de dealers se sont installées en utilisant la menace et le racket comme emprise envers les habitants et les travailleuses du sexe.
Inertie des autorités publiques
Le problème est large et englobe des phénomènes de déplacement de populations précarisées et marginalisées qui n’ont plus de lieu pour survivre. Nous constatons que les groupes de consommateurs de drogue qui sont chassés d’autres quartiers, de certains parcs, arrivent dans le quartier car les dealers prennent possession des lieux.
Les marchands de sommeil génèrent des situations d’extrême vulnérabilité. Un abandon des personnes vulnérables est intolérable. Mais à quand la fin d’un tel déclin ? Quelles perspectives dans le champ du possible pour voir un changement, une amélioration afin que chacun et chacune puisse s’y retrouver?
Selon nous, les actions doivent se faire à différents niveaux. Les communes doivent prendre leur responsabilité et agir vite pour rendre à ce quartier un espace de respiration et de sécurité.
Pour arrêter le déclin du quartier Nord bruxellois, il est urgent d’agir et de ne plus attendre le pire, comme le meurtre d’Eunice Osayanda en 2018, pour se réveiller.